[BLOG] Pourquoi les leaders performants maîtrisent-ils l’art du questionnement ?

Dans une époque où l'incertitude et la complexité sont devenues la norme, les leaders ne peuvent plus se contenter d'apporter des réponses préfabriquées. Ils doivent apprendre à poser les bonnes questions pour naviguer dans un environnement en perpétuel changement. Loin d'être un simple outil rhétorique, l'art du questionnement est un levier puissant de discernement, d'intelligence collective et de transformation organisationnelle.

Le questionnement, un levier de discernement pour le leader

L'acte de questionner est au cœur du développement de la pensée critique. Socrate, avec sa méthode maïeutique, considérait que l'art de poser des questions était le moyen le plus efficace d'amener ses interlocuteurs à découvrir la vérité par eux-mêmes. Dans un contexte managérial, cette approche permet aux leaders de stimuler la réflexion et d'encourager l'autonomie des collaborateurs.

John Dewey, dans How We Think (1910), explique que le questionnement est le moteur du pragmatisme : il ne s'agit pas seulement de comprendre une situation, mais de tester des hypothèses et de construire des solutions adaptées. Un leader qui sait interroger son environnement et ses équipes affine son discernement et prend de meilleures décisions.

Leadership et incertitude : la nécessité de poser les bonnes questions

Dans des environnements VUCA (Volatility, Uncertainty, Complexity, Ambiguity) et BANI (Brittle, Anxious, Nonlinear, Incomprehensible), les réponses toutes faites sont souvent obsolètes avant même d'être formulées. Poser les bonnes questions devient donc un atout stratégique pour naviguer dans cette complexité.

Ann Langley, spécialiste du leadership processuel, montre que les leaders efficaces ne cherchent pas à tout contrôler, mais à co-construire du sens avec leurs équipes en posant des questions ouvertes. Cela rejoint la pensée de Paul Ricœur, qui dans Soi-même comme un autre (1990), souligne que le dialogue et l'altérité sont essentiels pour prendre des décisions éthiques et éclairées.

Ainsi, un leader qui questionne sincèrement non seulement ses collaborateurs, mais aussi ses propres convictions, favorise une prise de décision plus adaptative et inclusive.

L’art du questionnement, un moteur de transformation organisationnelle

Au-delà du discernement individuel, l'art du questionnement impacte la dynamique organisationnelle. Un environnement qui encourage le questionnement est plus innovant, résilient et agile face aux changements.

Dans Prendre soin (2008), Bernard Stiegler met en garde contre l'automatisation des décisions et l'appauvrissement du raisonnement critique. Pour lui, poser des questions est un acte de résistance intellectuelle contre la standardisation des pensées et des pratiques. Dans une entreprise, cela signifie remettre en cause les routines inefficaces, encourager l'expérimentation et favoriser l'apprentissage en continu.

Des leaders comme Satya Nadella chez Microsoft ont transformé leur organisation en promouvant une culture du "learn-it-all" plutôt que du "know-it-all". En mettant l'accent sur la curiosité et le questionnement permanent, ils ont su insuffler une dynamique d'innovation et de remise en question constructive.

Conclusion

Maîtriser l'art du questionnement est une compétence essentielle pour les leaders confrontés à un monde incertain. En cultivant le questionnement comme outil de discernement, en l'intégrant dans la prise de décision et en en faisant un moteur de transformation organisationnelle, ils se donnent les moyens d'être non seulement plus efficaces, mais aussi plus inspirants et plus humains.

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Références :
1. Dewey, J. (1910). How We Think. Boston: D.C. Heath & Co.
2. Ricœur, P. (1990). Soi-même comme un autre. Paris: Seuil.
3. Stiegler, B. (2008). Prendre soin. Paris: Flammarion.
4. Langley, A. (1999). "Strategies for Theorizing from Process Data", Academy of Management Review, 24(4), 691-710.