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[BLOG] Petite histoire du questionnement comme outil de management de la connaissance

L'histoire du questionnement est une exploration fascinante de la manière dont les humains ont utilisé les questions pour comprendre le monde, apprendre, et communiquer. Bien que ce sujet soit rarement abordé de manière isolée, les philosophes y ont joué un rôle central. Nous proposons ici une histoire volontairement lacunaire et synthétique, qui permet d’en tracer les grandes lignes.

 

  1. Antiquité et Philosophie Grecque : Socrate est souvent considéré comme le père du questionnement philosophique occidental. Sa méthode, connue sous le nom de maïeutique consistait à poser une série de questions fermées pour stimuler la réflexion critique et éclairer les idées. On parle de maïeutique parce qu’il « accouchait » les esprits.

 

  1. Le Moyen Âge : la scolastique trouve ses racines dans les écoles monastiques et cathédrales du haut Moyen Âge. Le questionnement y est institutionnalisé comme une méthode de discussion et de raisonnement : la question est l’outil principal des débats, qui visent à éclairer les paradoxes et les contradictions des thèses disputées. On parle de dispute ou disputatio, pour évoquer l’analyse des positions possibles vis-à-vis d’une thèse. L’enjeu est ici d’être le plus argumenté et le plus analytique possible.

 

  1. Renaissance et Humanisme : cette période est celle d’un double mouvement. D’une part un retour aux textes anciens (Érasme ont encouragé un retour à la méthode socratique !) pour en produire un examen critique. D’autre part, on voit apparaître, avec Francis Bacon notamment, une nouvelle forme de questionnement dans les sciences, encourageant l’observation empirique et le questionnement des phénomènes naturels. Bacon critiquait les scolastiques, devenus à ses yeux stériles et inefficaces, entre autres parce que la place de la déduction (par opposition à l’induction à partir des observations) y était trop importante.

 

  1. Âge des Lumières: dans l’opposition entre les rationalistes (Descartes) et les empiristes (Locke), les questions ont été centrales dans la remise en cause des dogmes et des fausses croyances au motif d’une promotion de la raison et de la science. On voit naître des pensées sociales et politiques en lieu et place de pensées profondément métaphysiques.

 

  1. Époque Moderne : le questionnement devient central dans la mesure où la connaissance naît comme réponse à des questions spécifiques et testées par des expériences rigoureuses. Il apparaît central dans le processus d’apprentissage et d’appropriation. Il devient l’outil le plus important de la pédagogie.

 

  1. Phénoménologie et Sciences Cognitives : les recherches sur les biais cognitifs révèlent comment notre perception de la réalité est le fruit d’un ensemble de biais qui nous rendent performant dans sa compréhension tout autant qu’ils peuvent induire des écarts qui nous conduisent à des erreurs. Les questions sont alors centrales car elles ont un pouvoir d’influence et de prise de conscience dans nos processus de pensée et de décision.

 

  1. Technologie et Intelligence Artificielle : avec l'avènement des technologies numériques et de l'intelligence artificielle, de nouvelles formes de questionnement émergent, à la fois dans l'interaction homme-machine et dans la recherche algorithmique. Les IA génératives étant construites sur des modèles langagiers probabilistes, la qualité des questions - ou prompt - devient centrale pour exploiter au mieux les capacités de ces technologies.

 

Conclusion

L'histoire du questionnement traverse de nombreux domaines et époques, montrant comment les questions ont toujours été un outil central pour l'exploration, l'apprentissage et la compréhension humaine. Une chose pourtant est marquante : chacune des époques citées fait de la question un outil central, revisité au regard des enjeux de la période. Pour autant, ces époques ont en commun une chose : tout y était imprévisible et incertain. Comme notre époque, en somme. Voilà sans doute une des raisons pour lesquelles nous sommes convaincus que la qualité du questionnement est centrale pour des temps incertains. De là à penser que le rejet des questions au profit d’une approche exclusivement orientée vers les solutions constitue une défaite de la pensée et un marqueur de régression gravissime pour l’époque que nous traversons… il n’y a qu’un pas.

 

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